La création du « sursis probatoire »

 

La loi de programmation et de réforme pour la Justice, adoptée le 23 mars 2019, modifie de manière substantielle le droit des peines.

A compter du 24 mars 2020, la contrainte pénale disparaît, ainsi que le sursis avec mise à l’épreuve et le sursis avec obligation d’accomplir un travail d’intérêt général. A leur place a été créé le sursis probatoire.

Il s’agit, à l’instar des anciens sursis avec mise à l’épreuve ou sursis TIG, d’une peine d’emprisonnement à laquelle il est sursis sous réserve que le condamné respecte des obligations et interdictions fixées soit par le juge correctionnel soit par le juge de l’application des peines pendant un délai fixé au moment de sa condamnation.

Il peut être prononcé :

        – si la peine d’emprisonnement ou la partie ferme de la peine mixte prononcée est inférieure ou égale à 5 ans (10 ans en cas de récidive légale) (132-41 du Code pénal)

        – et si la personne n’a pas déjà fait l’objet de deux condamnations assorties du sursis probatoire pour des délits identiques ou assimilés et se trouve en état de récidive légale.

 

La période de probation doit être comprise entre 1 et 3 ans (5 ans si récidive, 7 ans si double récidive).

Comme pour le SME, le sursis probatoire peut être révoqué si le condamné ne respecte pas ses obligations pendant le délai probatoire (révocation par le juge de l’application des peines) ou si le condamné a commis une nouvelle infraction pendant le délai probatoire (révocation par le tribunal qui prononce la nouvelle condamnation, après avis du JAP ou par le JAP lui-même, si le tribunal a décidé de ne pas révoquer la peine de sursis probatoire).

On distingue le sursis probatoire simple du sursis probatoire renforcé, étant précisé que si la juridiction de jugement, lorsqu’elle possède des éléments de personnalité suffisant, peut décider des obligations et interdictions spécifiques, de nouvelles mesures pourront en tout état de cause être ensuite ajoutées ou déterminées par le juge de l’application des peines après une évaluation réalisée par le SPIP (service pénitentiaire d’insertion et de probation), et ce même si la juridiction avait initialement ordonné un sursis probatoire simple.

 

Le sursis probatoire simple :

Il est assorti :

– des mesures générales de contrôle listées par l’article 132-44 du code pénal : répondre aux convocations du juge de l’application des peines ou du service pénitentiaire d’insertion et de probation désigné ; recevoir les visites du SPIP et lui communiquer les renseignements ou documents de nature à permettre le contrôle de ses moyens d’existence et de l’exécution de ses obligations ; prévenir le SPIP de ses changements d’emploi, de ses changements de résidence ou de tout déplacement dont la durée excéderait quinze jours et rendre compte de son retour ; obtenir l’autorisation préalable du juge de l’application des peines pour tout changement d’emploi ou de résidence, lorsque ce changement est de nature à mettre obstacle à l’exécution de ses obligations ; informer préalablement le juge de l’application des peines de tout déplacement à l’étranger.

 – d’obligations particulières énumérées par l’article 132-45 du code pénal qui dispose :« La juridiction de condamnation ou le juge de l’application des peines peut imposer spécialement au condamné l’observation de l’une ou de plusieurs des obligations suivantes :

1° Exercer une activité professionnelle ou suivre un enseignement ou une formation professionnelle ;
2° Etablir sa résidence en un lieu déterminé ;
3° Se soumettre à des mesures d’examen médical, de traitement ou de soins, même sous le régime de l’hospitalisation.  (…)
4° Justifier qu’il contribue aux charges familiales ou acquitte régulièrement les pensions alimentaires dont il est débiteur ;
5° Réparer en tout ou partie, en fonction de ses facultés contributives, les dommages causés par l’infraction, même en l’absence de décision sur l’action civile ;
6° Justifier qu’il acquitte en fonction de ses facultés contributives les sommes dues au Trésor public à la suite de la condamnation ;
7° S’abstenir de conduire certains véhicules déterminés par les catégories de permis prévues par le code de la route ou de conduire un véhicule qui ne soit pas équipé, par un professionnel agréé ou par construction, d’un dispositif homologué d’antidémarrage par éthylotest électronique ;
7° bis Sous réserve de son accord, s’inscrire et se présenter aux épreuves du permis de conduire, le cas échéant après avoir suivi des leçons de conduite ;
8° Ne pas se livrer à l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise ou ne pas exercer une activité impliquant un contact habituel avec des mineurs ;
9° S’abstenir de paraître en tout lieu, toute catégorie de lieux ou toute zone spécialement désignés ;
10° Ne pas engager de paris, notamment dans les organismes de paris mutuels, et ne pas prendre part à des jeux d’argent et de hasard ;
11° Ne pas fréquenter les débits de boissons ;
12° Ne pas fréquenter certains condamnés, notamment les auteurs ou complices de l’infraction ;
13° S’abstenir d’entrer en relation avec certaines personnes, dont la victime, ou certaines catégories de personnes, et notamment des mineurs, à l’exception, le cas échéant, de ceux désignés par la juridiction ;
14° Ne pas détenir ou porter une arme ;
15° Accomplir à ses frais un des stages prévus à l’article 131-5-1 du présent code ;
16° S’abstenir de diffuser tout ouvrage ou oeuvre audiovisuelle dont il serait l’auteur ou le coauteur et qui porterait, en tout ou partie, sur l’infraction commise et s’abstenir de toute intervention publique relative à cette infraction ; les dispositions du présent alinéa ne sont applicables qu’en cas de condamnation pour crimes ou délits d’atteintes volontaires à la vie, d’agressions sexuelles ou d’atteintes sexuelles ;
17° Remettre ses enfants entre les mains de ceux auxquels la garde a été confiée par décision de justice ;
18° En cas d’infraction commise soit contre son conjoint, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, soit contre ses enfants ou ceux de son conjoint, concubin ou partenaire, résider hors du domicile ou de la résidence du couple et, le cas échéant, s’abstenir de paraître dans ce domicile ou cette résidence ou aux abords immédiats de celui-ci, ainsi que, si nécessaire, faire l’objet d’une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ; (…)
18° bis Respecter l’interdiction de se rapprocher d’une victime de violences commises au sein du couple prévue à l’article 132-45-1 du présent code contrôlée par un dispositif électronique mobile anti-rapprochement ;
19° Obtenir l’autorisation préalable du juge de l’application des peines pour tout déplacement à l’étranger ;
20° Respecter les conditions d’une prise en charge sanitaire, sociale, éducative ou psychologique, destinée à permettre sa réinsertion et l’acquisition des valeurs de la citoyenneté ; cette prise en charge peut, le cas échéant, intervenir au sein d’un établissement d’accueil adapté dans lequel le condamné est tenu de résider ;
21° L’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général, selon les modalités prévues à l’article 131-8 ; le condamné doit en ce cas se soumettre à l’examen médical prévu au dernier alinéa de l’article 131-22 ;
22° L’injonction de soins, dans les conditions prévues aux articles L. 3711-1 à L. 3711-5 du code de la santé publique, si la personne a été condamnée pour un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru et qu’une expertise médicale a conclu qu’elle était susceptible de faire l’objet d’un traitement ;
23° L’obligation de justifier de la remise d’un bien dont la confiscation a été ordonnée ;
24° L’obligation de justifier du paiement régulier des impôts ;
25° L’obligation de justifier de la tenue d’une comptabilité régulière certifiée par un commissaire aux comptes.

Un nouvel article 485-1 du code de procédure pénale précise que « les obligations particulières du sursis probatoire n’ont pas à être motivées ».

Si une obligation de TIG est prononcée, la juridiction doit recueillir le consentement du condamné, que le prévenu pourra faire connaitre par écrit s’il est représenté par son avocat à l’audience. Attention : si le prévenu est absent il pourra être condamné à cette obligation d’effectuer un TIG et c’est alors le juge de l’application des peines qui devra contrôler son consentement.

 

Le sursis probatoire renforcé (132-41-1 du code pénal) :

Il s’agit d’un sursis probatoire avec un suivi pluridisciplinaire et évolutif en fonction d’évaluations régulières effectuées par le service pénitentiaire d’insertion et de probation.

La volonté du législateur est de prévenir la récidive en favorisant l’insertion ou la réinsertion du condamné.

Il vient remplacer la contrainte pénale, sanction dont peu de juridictions s’étaient saisies.

Le sursis probatoire renforcé peut être prononcé par le juge si la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale de l’auteur et les faits pour lesquels il est condamné justifient un accompagnement socio-éducatif individualisé et soutenu.

Ph.EXPERT